Monsieur le Président,
La Suisse tient à remercier l’Allemagne pour l’organisation de ce débat et les participants pour leurs contributions. Les effets du changement climatique sur l’environnement, l’économie et la société sont profonds et exacerbent des vulnérabilités et inégalités existantes. Lorsqu’il se combine avec des vecteurs de conflit déjà en place, notamment l’instabilité politique et économique, le changement climatique multiplie les risques en rendant les conflits plus probables et en accentuant leur intensité et leur durée.
La Suisse vise à limiter l’impact du changement climatique sur la sécurité, notamment à travers notre initiative Blue Peace, lancée en 2010 qui soutient la coopération transfrontalière pour favoriser le dialogue sur l'accès à l’eau. La Suisse co-préside l’initiative de Nansen et soutient la Plateforme sur les déplacements liés aux catastrophes naturelles. Lorsque des catastrophes ou les effets du changement climatique entraînent des déplacements forcés, ceux-ci peuvent agir comme facteur de tensions sociales et de conflits.
Le Conseil de sécurité reconnaît les effets néfastes du changement climatique sur la paix et la sécurité internationale, comme reflété dans la résolution 2349 (2017). Nous nous félicitons du fait que le Conseil ait évoqué, ces dernières années, les risques sécuritaires liés au climat dans ses différents travaux et que la nécessité de mieux évaluer ces risques ait été prise en compte dans des contextes instables comme en Somalie, au Mali, en Afrique de l’Ouest et au Sahel, ainsi qu’au Darfour.
La Suisse souhaiterait souligner trois domaines d’action, appelant une réponse du Conseil de sécurité afin d’atténuer les risques liés au climat et à la sécurité.
Premièrement, comme le montre la nature interdépendante des objectifs de l'Agenda 2030, l’action climatique concerne de multiples organes et programme d’actions des Nations Unies. Le Conseil de sécurité a reconnu le lien entre la paix et la sécurité et le développement durable, et doit désormais aussi prendre pleinement en compte les implications du changement climatique sur la paix et la sécurité. Il doit également inclure l’égalité entre les sexes et reconnaître le rôle innovateur de la jeunesse. La Suisse apprécie l’engagement du Groupe des amis sur le climat et la sécurité. Nous soutenons sa déclaration commune réclamant un rapport du Secrétaire général de l’ONU prospectif et spécifique aux régions concernant les risques sécuritaires liés au climat. Des comptes rendus réguliers exploitant les structures existantes au sein de l’ONU afin de riposter de manière efficace à ces risques, sont cruciaux.
Deuxièmement, le Conseil de sécurité doit systématiquement prendre en compte les risques liés au climat dans les situations régionales ou nationales dont il est saisi. Il doit capitaliser sur les informations et les ressources disponibles au sein du système onusien. Les systèmes d'alerte précoce doivent identifier systématiquement les situations dans lesquelles le changement climatique agit comme multiplicateur de risques afin d'élaborer des réponses adéquates. Des collectes de données et scénarios climatiques et des systèmes d'alerte précoce sont déjà utilisés avec succès. Il est important de partager ces connaissances et de promouvoir les synergies à l'ONU, y compris au Conseil de sécurité. Une meilleure coordination au sein du système onusien permettra une réponse appropriée aux défis auxquels nous faisons face.
Troisièmement, la pandémie de COVID-19 intensifie la crise climatique, renforce les inégalités sociales et constitue un risque à la paix et la sécurité. Elle accroît la vulnérabilité des populations vivant dans des régions touchées par les conflits, la fragilité et le changement climatique. Sous l’effet conjugué du changement climatique, de la COVID-19 et des conflits, des millions de personnes dépendent aujourd’hui d’une aide humanitaire. Les femmes, les enfants, les personnes âgées et celles avec handicap ainsi que les populations déplacées sont particulièrement vulnérables. La COVID-19 ne saurait être utilisée pour justifier une régression dans la protection climatique, et la mise en œuvre de l’Accord de Paris doit rester une priorité.
Monsieur le Président,
Il est nécessaire d’analyser ensemble le changement climatique, la fragilité et les risques accentuant les conflits. Le changement climatique doit être pris en compte de manière systématique et intégrée afin de prévenir les conflits et améliorer la résilience ainsi que les mesures d’adaptation. Les politiques en matière de climat et de développement doivent être plus sensibles aux risques de conflits et les politiques de sécurité plus sensibles au climat.
Je vous remercie.