Monsieur le Président,

« Le monde est rempli à la fois de souffrance et de victoires sur la souffrance. » C’est ainsi que l’activiste des droits des femmes, Helen Keller, décrit la résilience. Dans son mémoire « Danser à la mosquée », l’auteure afghane Homeira Qaderi illustre cela en nous racontant son adolescence à Herat, sous le régime des Talibans, ou elle réussit – clandestinement – à enseigner à des jeunes filles et devenir, elle-même, une littéraire.

Homeira Qaderi est exceptionnelle, mais elle n’est pas une exception. Les femmes sont très souvent en première ligne pour construire la paix dans leurs communautés, non seulement en Afghanistan, mais aussi au Myanmar, au Sahel ou en Ukraine – pour ne citer que quelques exemples. Elles s'engagent avec courage pour la prévention et la résolution des conflits, la reconstruction, l’aide humanitaire et la justice. Dans de nombreux pays elles sont à l'avant-garde des mouvements contre les régimes autoritaires et refusent d'accepter des propositions politiques qui ne garantissent pas leurs droits.

Et pourtant, nous observons la remise en cause des acquis de l’égalité des genres. Le fossé entre le cadre normatif et la réalité continue à s’élargir, alors que ces femmes pourraient investir leur immense potentiel dans l’avenir de leurs pays. S'appuyer principalement sur la résilience des femmes n'est ni durable ni juste.

Le Conseil a le devoir et le pouvoir de soutenir les artisanes de la paix et de garantir le respect de leurs droits. En tant que membre élu du Conseil de Sécurité la Suisse y contribuera comme suit :

Au Conseil même, mon pays tentera de poursuivre une approche systématique, innovatrice et orientée vers l’action. Nous chercherons à intégrer l’agenda Femmes, Paix et Sécurité dans tous les contextes à l’agenda du Conseil et à prévenir les représailles. Nous rejoindrons ainsi la déclaration sur les « Shared Commitments ».

En ce qui concerne l’action sur le terrain, le rapport du Secrétaire-générale illustre que nous sommes loin d’atteindre la participation égale et significative des femmes dans toutes leur diversité et à toutes les étapes des processus de paix. La Suisse continuera donc à appuyer la création de réseaux de femmes médiatrices et bâtisseuses de paix, comme par exemple au Liban, où nous soutenons des efforts de réseautage entre des femmes de différents horizons politiques. Nous nous concentrerons sur la participation des femmes aux processus de paix et resterons à l’écoute des voix de la société civile.

Et finalement, le succès de tous ces efforts dépend de la garantie d'un environnement sûr pour la participation des femmes. La hausse des attaques contre les écoles visant les étudiantes et enseignantes ainsi que le grand nombre de violences sexuelles liées aux conflits signifient une tendance négative préoccupante. Le respect du droit international humanitaire est une obligation absolue pour tous les acteurs, y inclus les groupes armés non-étatiques. Quand ces droits ne sont pas respectés, le Conseil doit utiliser les instruments à sa disposition pour s’assurer que les responsables rendent des comptes. L’inclusion de critères de désignation axés sur la violence sexuelle et sexiste dans les régimes de sanctions en fait partie.

Le Conseil est régulièrement briefé par des femmes artisanes de paix et défenseuses des droits humains. Il est crucial qu’il ne compte pas uniquement sur leur résilience, mais qu’il prenne action pour la mise en œuvre intégrale du cadre normatif de l’agenda femmes, pays et sécurité.

Je vous remercie.