Madame la Présidente,

Laissez-moi tout d’abord exprimer les plus sincères condoléances de la Suisse à l’égard des familles des milliers de victimes du tremblement de terre qui a frappé la Türkiye et la Syrie.

Cette catastrophe d’une magnitude sans précédent depuis des décennies s’ajoute aux crises humanitaires déjà aiguës qui affectent la région. La Suisse est aux côtés des victimes et de leurs proches, et nous espérons que le plus de personnes possible puissent encore être sauvées dans les heures qui suivent.

Madame la Présidente,

Le 7 avril 2018 d’autres faits gravissimes faisaient d’innocentes victimes syriennes à Douma, dans la banlieue de Damas. Ce jour-là, 43 civils, – 7 hommes, 17 femmes, 9 garçons et 10 filles – mourraient à la suite d’une attaque au gaz de chlore. Nous savons grâce à l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques que ce n’était pas un accident, mais une attaque délibérée utilisant l’arme chimique, qui est interdite par le droit international.

Au cours des dix dernières années, les obligations découlant de la Convention sur l’interdiction des armes chimiques ont été violées à plusieurs reprises en Syrie. Le troisième rapport de l’Équipe d’enquête et d’identification du 27 janvier dernier, qui porte sur l’attaque survenue à Douma en avril 2018, en apporte une nouvelle démonstration.

Le rapport de l’OIAC, dont je remercie ici le Directeur Général, Monsieur Arias, et Monsieur Oñate, chef de l’Equipe d’enquête et d’identification, présente les faits suivants. Il documente que le 7 avril 2018 au moins un hélicoptère de la République Arabe Syrienne a largué deux cylindres qui ont touché des bâtiments résidentiels à Douma. De ces cylindres s’est échappé du gaz de chlore. Ce gaz agit sur plusieurs systèmes corporels – la peau et les muqueuses, le tube digestif et le système respiratoire, où il est absorbé par les poumons – nous donnant une idée du sort des personnes affectées. L’OIAC conclut qu’il « existe des motifs raisonnables de penser » que les auteurs de cette attaque faisaient partie de l’armée de l’air de la République arabe syrienne au moment des faits. Ainsi, à ce jour, 9 des quelque 25 attaques chimiques documentées par l’ONU et l’OIAC en Syrie ont été attribuées au gouvernement syrien.

La Suisse appuie pleinement les conclusions de ce rapport. Nous faisons entièrement confiance à l’OIAC, y compris à l’Equipe d’enquête et d’identification. Leur travail est fondamental. Leur professionnalisme et leur intégrité ne font pas de doute.

La Suisse condamne l’utilisation d’armes chimiques, y compris à Douma en 2018. Nous appelons toutes les parties à s’abstenir d’utiliser de telles armes et à respecter leurs obligations découlant du droit international humanitaire. Nous nous joignons aux appels répétés du Secrétaire général pour demander que les responsables de l’emploi de telles armes soient tenus de rendre des comptes.

L’établissement des faits est crucial pour empêcher que de nouvelles attaques se produisent et que ces crimes restent impunis. Nous saluons à cet égard la coopération formelle entre l’OIAC et le Mécanisme international, impartial et indépendant pour la Syrie, que nous soutenons pleinement. Cette coopération est conforme aux souhaits du Conseil de sécurité qui, en adoptant à l’unanimité la résolution 2118 il y a dix ans, a exprimé sa « ferme conviction que les personnes responsables de l'utilisation d'armes chimiques en Syrie doivent répondre de leurs actes. »

Madame la Présidente,

Nous appelons la Syrie à coopérer pleinement avec l'OIAC, à accepter le personnel désigné par cette organisation et à lui fournir un accès immédiat et sans entrave à tous les sites.

Nous espérons que la récente visite en format réduit de l’Equipe d’évaluation des déclarations, dont le rapport est attendu en mars, marque le recommencement d’une coopération pleine de la Syrie avec l’OIAC.

Comme vient également de le rappeler la Haute Représentante aux Affaires de désarmement Madame Nakamitsu, que je remercie, la Syrie doit fournir au Secrétariat de l’OIAC des réponses aux 20 points restés en suspens afin que sa déclaration initiale puisse être vérifiée. Nous notons également que le Secrétariat de l’OIAC est, depuis le 15 juillet 2021, en attente de toutes les informations pertinentes de la part de la Syrie concernant le déplacement non-autorisé et la destruction des deux cylindres utilisés lors de l’attaque de Douma.

Pour conclure, j'aimerais nous rappeler les 43 victimes de l’utilisation d'armes chimiques à Douma : il est, aussi dans leur mémoire, de notre devoir de veiller à ce que ces armes ne soient plus jamais utilisées – par qui que ce soit, à n'importe quel moment et dans n'importe quelles circonstances.

Je vous remercie.