Excellences,  

C’est un très grand plaisir de vous accueillir à cette réunion en format Arria portant sur la question des personnes disparues, un aspect absolument crucial de la protection des civils et d’autres personnes protégées dans les conflits armés. Cinq ans après l’adoption de la résolution 2474 – alors que le Koweït était au Conseil de sécurité – et avec le plein soutien de nos partenaires de l’Alliance mondiale pour les personnes disparues, par ailleurs co-parrains de cette réunion, nous souhaitons poursuivre le dialogue sur la meilleure manière de prévenir les disparitions de personnes dans les conflits armés.

Mesdames et Messieurs,

Chaque conflit armé laisse une trace indélébile de souffrance humaine. Parmi les blessures les plus profondes figurent celles causées par la disparition d’un être cher, laissant des familles et des communautés entières dans un insoutenable état d’incertitude. Comme l’a formulé la mère d’une personne disparue : « Si vous perdez quelqu’un à cause d’un accident ou de la maladie, vous savez que cette personne ne reviendra jamais. Mais dans le cas d’une personne disparue, vous avez encore de l’espoir, un espoir qui risque de ne jamais se réaliser. »

Permettez-moi de souligner quatre aspects qui me semblent particulièrement importants :

Premièrement, en temps de paix et surtout dès le premier jour d’un conflit, des mesures doivent être mises en place pour prévenir les disparitions, ainsi que pour remédier à ces dernières et informer les familles. Les parties à un conflit armé ont une responsabilité première de prendre ces mesures. Trop souvent, des civils sont délibérément pris pour cible, y compris par le biais d’arrestations et de détentions arbitraires, de disparitions forcées ou d’enlèvements, des actes strictement interdits par le droit international humanitaire. Le traitement digne des morts, même du côté de l'ennemi, est essentiel pour la dignité humaine lors des conflits armés. 

Deuxièmement, l’importance des mécanismes de prévention. La résolution 2474 mentionne à cet égard des exemples concrets et pratiques, tels que l’enregistrement des détenus, la formation appropriée des forces armées ou le développement des technologies aidant à l’identification des personnes. Pour renforcer la prévention, la Suisse collabore avec d’autres Etats, notamment les membres de l’Alliance mondiale pour les personnes disparues, des organisations humanitaires et des communautés directement affectées. En parallèle, nous soutenons l’Agence centrale de recherches, l’une des plus anciennes institutions du CICR consacrées par les Conventions de Genève – et nous avons le plaisir d’en avoir la représentante ici. 

Troisièmement, nous devons reconnaitre le rôle crucial joué par les familles – et notamment les femmes – dans la recherche des disparus. La création de nombreuses associations de familles dirigées par des femmes en témoigne. Selon le droit international des droits de l’homme et le droit international humanitaire, les familles ont le droit de savoir ce qui est advenu de leurs proches. Outre ces obligations légales, l’implication des familles et l’établissement des mécanismes nationaux dans le processus de recherche sont primordial. La société civile a par exemple joué un rôle-clé dans la création d’une institution indépendante onusienne chargée de la question des personnes disparues en Syrie. Il y a quelques semaines, l’Assemblée générale a alloué les ressources nécessaires au fonctionnement de cette institution qui siègera à Genève. 

Mon dernier point concerne la nécessité d’inclure systématiquement la thématique des personnes disparues dans les dossiers géographiques du Conseil. C’est déjà le cas dans certains contextes, comme Chypre, l’Iraq et la Syrie. De nombreux autres contextes sont néanmoins concernés par cette problématique. Alors que les conflits se multiplient, le nombre de personnes disparues augmente. La résolution 2474 demande « à toutes les parties à un conflit armé, lorsqu’elles négocient ou appliquent un accord de paix, d’inclure des dispositions visant à faciliter la recherche des personnes disparues ». Pour que le maintien et les négociations de paix soient couronnées de succès, la question des personnes disparues doit donc être adressée systématiquement. Tout doit être entrepris pour éviter que d’autres personnes ne disparaissent dans les conflits ainsi que pour faire toute la lumière sur celles qui sont portées disparues. Les familles ont le droit de savoir ! La lutte contre l'impunité et l'établissement des processus de justice transitionnelle peuvent jouer un rôle clef en vue de la réconciliation et de la paix. 

Excellences,

Aujourd’hui, nous avons le plaisir de bénéficier d'interventions des experts dans le domaine :

  • D’abord, j’ai le grand plaisir de saluer l’Ambassadeur Tareq Albanai, Représentant permanent du Koweït auprès des Nations Unies, qui a joué un rôle essentiel – lui personnellement et son pays – dans l'adoption de la résolution 2474 il y a cinq ans ;
  • Puis, nous avons Madame Luz Janeth Forero Martinez : Directrice de l'Unité de Recherche des Personnes Disparues dans le contexte du Conflit Armé en Colombie. Mme Forero Martínez a contribué à des avancées majeures dans la recherche sur les disparitions en Colombie. Son engagement pour une recherche transparente et son dévouement aux familles de personnes disparues sont les pierres angulaires de son travail.
  • Je souhaite aussi la bienvenue à M. Ram Kumar Bhandari, qui est un défenseur des droits de l’homme et chercheur népalais. Suite à la disparition de son père en 2001 pendant le conflit armé au Népal, Mr. Bhandari a commencé à s’engager en faveur d’un système de justice transitionnelle qui répond aux besoins des familles de personnes disparues. Il a contribué au lancement d’une station de radio communautaire, d’un réseau des familles de disparus au Népal ainsi que d’un réseau international des victimes et des survivantes et survivants des violations des droits de l’homme. 
  • Et finalement, Mme Florence Anselmo est en charge de l’Agence centrale de recherches du CICR. L’Agence a pour but de prévenir les disparitions, préserver et rétablir les liens familiaux, rechercher les personnes portées disparues, protéger la dignité des morts et subvenir aux besoins des familles. 

 

Message de clôture

Je vous remercie, toutes et tous, chers et chères collègues, à commencer aussi par les panelistes, de votre précieuse contribution. Un grand nombre d'aspects ont été soulevés concernant la mise en œuvre de la résolution 2474 et l'intégration de la question des personnes disparues dans l'ordre du jour du Conseil.

La résolution 2474 – et je crois que l’on a pu voir encore une fois à quel point elle était visionnaire, et je voudrais remercier le Koweït pour avoir présenté cette résolution il y a 5 ans. Elle nous rappelle les différentes mesures nécessaires afin de prévenir et de traiter les cas de disparition dans les conflits armés. Elle réaffirme aussi les obligations cruciales que nous avons sous le droit international humanitaire qui incombent à toutes les parties aux conflits. Malgré cela, on a aussi entendu du CICR qu’en 2023 le nombre a été le plus élevé dans le contexte des cas de disparition depuis des décennies. Nous avons entendu que la question reste à l’ordre du jour et qu’elle nous occupe dans tous les contextes des conflits. Nous avons aussi eu la chance d’entendre des réponses possibles au niveau national avec des institutions mais aussi le grand engagement des familles touchées par les disparitions forcées.

Et je crois que nous avons entendu de tout le monde que la question des personnes disparues est cruciale dans toutes les phases des conflits. Si elle demeure irrésolue, elle peut avoir des conséquences dévastatrices sur la période post-conflit, compliquant la réconciliation et l’instauration d’une paix durable. C’était impressionnant d’entendre combien de collègues représentent des pays qui sont encore aujourd’hui, parfois des décennies après des conflits, touchés par la question des personnes disparues.

Excellences, collègues,

Pour la Suisse, la protection des civils dans les conflits armés est une priorité de longue date que nous poursuivons également au sein de ce Conseil. Œuvrer à la prévention et à la résolution des cas de disparitions dans les conflits en fait intégralement partie, et cela restera pour nous une priorité. Et j’espère que l’on pourra la poursuivre avec tous les membres du Conseil qui sont réunis ici, aussi en partenariat avec les institutions, la société civile, les Nations Unies, le CICR, et tout le monde ici présent.

Je voudrais vous remercier, je voudrais remercier aussi nos partenaires de l’Alliance globale ainsi que l’ONU qui nous a aidé pour organiser cette réunion, les traducteurs et traductrices mais surtout mon équipe qui a aidé à préparer cette réunion.   

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