Monsieur le Président,
Je remercie l’Envoyée spéciale, Mme María Salvador pour son exposé dans le cadre de ses nouvelles fonctions à la tête du Bureau intégré des Nations unies en Haïti, et je tiens à exprimer le soutien continu de la Suisse à la mise en œuvre de son mandat. Je remercie également la Directrice exécutive de l’Office contre la drogue et le crime, Mme Ghada Waly pour son intervention et nous saluons la présence des Ministres des affaires étrangères du Haïti et de la République dominicaine ainsi que du Représentant permanent du Canada dans cette séance.
Les exposés que nous venons d’entendre illustrent la détérioration continue de la situation sécuritaire et les violations flagrantes des droits de l'homme auxquelles les Haïtiennes et les Haïtiens sont confrontés quotidiennement. La liberté et la circulation de la population dans la région métropolitaine de Port-au-Prince sont fortement restreintes. Presque aucune zone de la capitale et de ses environs n'est épargnée par la violence des gangs. Nous condamnons le recours systématique à la violence sexuelle par les gangs, ainsi que le ciblage des enfants et le recrutement de mineurs. Le rapport du Secrétaire général souligne que l’insécurité dans la capitale a atteint des niveaux comparables à ceux de pays en situation de conflit armé.
Le rétablissement de la stabilité et de la sécurité dans le pays reste une tâche primordiale. Des dizaines de milliers de personnes ont été déplacées. La répression de la violence des gangs, voire leur désarmement, permettrait de favoriser les efforts de reconstruction des structures étatiques. Par sa présence continue dans différentes régions d'Haïti, la Suisse entend fournir une aide humanitaire en ces temps difficiles.
Permettez-moi de souligner les trois points suivants :
Premièrement, il faut réduire l’insécurité alimentaire urgemment et de manière durable. Près de la moitié de la population souffre d’une insécurité alimentaire aiguë et on estime que 1,8 million de personnes sont aujourd’hui en situation d'urgence. La gravité de la crise alimentaire s’est rapidement détériorée au cours des deux dernières années. Les niveaux sont sans précédent. En raison des défis structurels, les effets néfastes du changement climatique et des catastrophes naturelles récurrentes exacerbent cette situation. De plus, l'expansion des activités des gangs dans des zones importantes pour la production alimentaire risque de plonger encore plus de personnes dans la faim. La Suisse a augmenté son financement pour le Programme alimentaire mondial. Nous encourageons les organisations humanitaires et de développement à continuer de fournir l’aide d'urgence nécessaire. Sans sécurité alimentaire, la stabilité en Haïti ne sera pas possible.
Deuxièmement, la distribution sûre, rapide et sans entrave de l’assistance humanitaire reste essentielle pour la survie de nombreuses personnes. Les activités des gangs restreignent l'accès à la population ayant urgemment besoin de biens et de services de base. L’accès sans restriction du personnel humanitaire doit être garanti. La Suisse est préoccupée par les attaques continues des gangs contre le personnel médical et les infrastructures critiques, les enseignants et les acteurs humanitaires. Nous nous joignons à l'appel du Secrétaire général pour leur protection. Notre engagement de longue date en Haïti a démontré que, malgré une situation sécuritaire difficile, le renforcement des communautés et ses institutions gouvernementales au niveau municipal et départemental peut faire la différence. Au sud du pays, la Suisse s’engage par exemple pour renforcer la gouvernance locale de l’eau et de l’assainissement.
Troisièmement, en plus de certains progrès qui ont été accomplis au niveau politique, le renforcement du système judiciaire doit être accéléré sans délai. L'impunité et la corruption doivent être combattues pour lutter efficacement contre l'autonomie et l'indépendance croissantes des gangs et pour briser le cycle de la violence.
La communauté internationale doit rester aux côtés des Haïtiennes et Haïtiens pour répondre à leurs besoins et pour les soutenir dans la recherche d’un consensus permettant de sortir de la crise politique. Cela est également important pour créer les conditions propices à des élections sûres et libres. La Suisse s’engage dans ce sens.
Je vous remercie.