Monsieur le Président,
Je vous remercie d’avoir convoqué cette séance et je remercie la Représentante spéciale Mme Otunbayeva pour son témoignage sur l’évolution préoccupante de la situation en Afghanistan, et pour son travail précieux. Je remercie également Mme Zubaida Akbar de son exposé et de son engagement pour et avec celles et ceux qui luttent pour le respect des droits humains tous les jours et, comme nous l’avons entendu, risquent leur vie.
Monsieur le Président,
Triste coïncidence : nous célébrons aujourd’hui la journée internationale des femmes autour du monde, alors que les femmes et les filles en Afghanistan sont au centre de nos préoccupations. Au début de cette année, la Directrice d’ONU Femmes nous l’avait rappelé : « Les femmes afghanes ne nous ont laissé aucun doute sur leur courage et leur refus d'être effacées de la vie publique. Elles continueront à défendre et à se battre pour leurs droits, et nous avons le devoir de les soutenir dans cette démarche ». La participation pleine, égale et significative des femmes a été demandée à de nombreuses reprises dans cette salle hier lors du débat ouvert sur les femmes, la paix et la sécurité. Pourtant, nous ne pouvons pas nous reposer uniquement sur des mots. Que ce soit en Afghanistan ou ailleurs dans le monde, faire de la mise en œuvre de la résolution 1325 une réalité est notre obligation.
En Afghanistan, les femmes et les filles voient bafoués leurs droits humains et leurs libertés fondamentales au quotidien. Le rapport du Secrétaire général et l’exposé de la Représentante spéciale nous le démontrent : la situation continue de s’aggraver. La liste des incidents violents à l’encontre des femmes et des filles comprend des meurtres, des crimes d'honneur, des mariages forcés, ou encore des coups pouvant engendrer des handicaps. Alors que leur accès à l’éducation et au travail est quasiment réduit à néant, nous appelons les Talibans à revenir sans délai sur les interdictions faites aux femmes et aux filles. La Suisse condamne toutes les violations des droits de l’homme commises par les talibans, en particulier les violations des droits des femmes, mais aussi des enfants et des minorités ethniques.
Monsieur le Président,
Nous négocions actuellement le renouvellement du mandat de la MANUA. La Suisse se joint à l’appel du Secrétaire général et soutient une prolongation du mandat actuel qui permettra à la mission de poursuivre ses activités vitales pour le peuple afghan. Dans l’avenir proche, deux domaines d’action nous semblent prioritaires pour l’engagement onusien:
Premièrement, ce Conseil et la MANUA doivent soutenir tous les efforts visant à promouvoir un Afghanistan où l’ensemble de la société participe à la vie publique, sans discrimination ni représailles. La protection des droits humains est essentielle pour la stabilité du pays. Les femmes et les filles doivent avoir accès à l’éducation, au travail, à la politique et à la vie sociale et économique. Nous défendons le droit des femmes à participer à tous les processus de décision. Cela est indispensable pour répondre aux besoins humanitaires immédiats, mais également pour le développement économique et social, ainsi que la construction d’une paix durable. Le travail des femmes afghanes dans de nombreuses ONG sur le terrain est essentiel pour atteindre ces objectifs.
Deuxièmement, nous devons répondre aux besoins humanitaires et trouver des solutions durables à l'insécurité alimentaire endémique en Afghanistan. Des décennies de dégradation de l'environnement ont augmenté la désertification et aggravé la sécheresse. La résilience des Afghanes et des Afghans est poussée à ses limites. 28 millions de personnes dépendent de l'aide humanitaire pour survivre. Mais au-delà de la fourniture immédiate de l'aide, nous devons poursuivre notre soutien à long terme. Face aux défis croissants résultant du changement climatique, il faut soutenir le peuple afghan pour qu’il puisse adapter son agriculture et rendre la gestion des ressources naturelles plus durable. De plus, les services publics de base doivent pouvoir fonctionner, notamment dans les domaines de l’éducation et de la santé publique. Une économie stable est nécessaire pour créer des perspectives pour un futur digne.
Monsieur le Président,
L’Afghanistan fait face à des multiples crises qui se renforcent mutuellement et qui l’ont plongé dans une insécurité profonde. Nous devons nous rassembler autour d'une stratégie commune et soutenir la population dans ses efforts pour retrouver la sécurité. Ces efforts ne pourront toutefois aboutir que si les talibans reviennent sur leurs actions misogynes et reconnaissent le rôle clé des femmes dans la société, l'économie et la politique. Nous leur demandons d’annuler leurs récents décrets interdisant aux femmes d’accéder à l’enseignement supérieur et de travailler pour des ONG. Plus généralement, ils doivent reconnaitre l’importance d’une gouvernance inclusive et de l’état de droit. Pour soutenir ces objectifs, l’ONU doit maintenir sa présence sur le terrain – en sécurité et sans menaces – à travers un mandat fort pour son engagement. Nous vous assurons de notre soutien continu à cette cause.
Je vous remercie.