Monsieur le Président,

L'intelligence artificielle a fortement affecté et impacté la diplomatie onusienne ces deux dernières années, marquant également le mandat de la Suisse comme membre élu du Conseil de sécurité. L'impact de cette technologie sur le maintien de la paix et sécurité internationale est une question pertinente et d'actualité. Nous remercions les Etats Unis d’avoir organisé cet évènement et les intervenants pour leurs exposés éclairants.

La diffusion de l'intelligence artificielle est caractérisée par un rythme extrêmement rapide et par son caractère profondément disruptif. Cependant, elle s’inscrit dans un cadre immuable : celui du droit international public, y compris du droit international humanitaire et des droits de l'homme. La Suisse réaffirme avec force, que ce cadre juridique existant s'applique pleinement à l'IA, comme nous l'avons souligné à maintes reprises. En outre, des considérations éthiques doivent également être prises en compte.

Le Conseil de sécurité doit se pencher attentivement sur les conséquences de l'IA sur le maintien de la paix et sécurité. À cet égard, la Suisse souhaite mettre en avant trois points :

Premièrement, le Conseil doit favoriser une discussion inclusive sur la gouvernance de l'IA.

Afin d'assurer que les systèmes d'intelligence artificielles soient sûrs, sécurisés et dignes de confiance, des règles efficaces sont indispensables. Les pays à la pointe du développement de tels systèmes sont parmi les membres de ce Conseil ; ils ont une responsabilité particulière.

Mais l'ONU offre également une plateforme pour un dialogue continu, capable d’assurer l'interopérabilité des approches de gouvernances au niveau mondial. Afin d'être efficace, l'inclusion effective de toutes les parties prenantes - étatiques et non-étatiques - est essentielle. Avec plusieurs résolutions, y compris dans le domaine militaire, ainsi que le Pacte numérique mondial, l'Assemblée générale a d'ores et déjà commencé à mettre en place certains principes, ancrés dans presque vingt ans d'expérience onusienne dans le domaine numérique depuis le Sommet mondial sur la société de l'information. Ces travaux sont complétés par d'autres initiatives telles que le Sommet sur l’IA responsable dans le domaine militaire (REAIM). Il est crucial que ce Conseil articule également sa perspective sur la gestion d’une gouvernance inclusive afin de contribuer aux processus et délibérations existants.

Deuxièmement, l'intelligence artificielle est une opportunité pour une mise en œuvre plus efficace des mandats du Conseil.

En tant qu’outil, l'intelligence artificielle peut faciliter la mise-en-œuvre des mandats décidés par le Conseil de sécurité. La Suisse a organisé une réunion de type Arria en mai 2024, qui a illustré ce potentiel de manière concrète, notamment dans le contexte des opérations de maintien de la paix. En collaboration avec la DiploFoundation basée à Genève, la Suisse a réalisé un outil, basé sur l'IA, qui facilite l'accès et l'analyse des données issues de dix réunions du Conseil avec un focus particulier sur le Nouvel agenda pour la paix.

Troisièmement, le Conseil doit promouvoir des mesures tout au long du cycle de vie des systèmes d'intelligence artificielle, afin qu'ils soient sûrs, sécurisés et dignes de confiance

En priorité, le Conseil doit mieux anticiper l'impact des technologies telles que l'IA sur le maintien de la paix et de la sécurité, en agissant de manière préventive. La Suisse a organisé un briefing du Conseil en octobre 2024, ainsi que la publication d'une déclaration présidentielle à ce sujet. Dans cette déclaration, le Conseil a exprimé sa détermination à prendre en compte plus systématiquement les avancées scientifiques qui pourraient avoir une incidence sur la paix et sécurité internationale.

Lors du développement et du déploiement de systèmes d'intelligence artificielle, l'être humain et sa dignité doivent toujours être au centre des préoccupations. Une diligence raisonnable en matière de droits humains et un contrôle humain, sont deux éléments essentiels à prendre en compte.

L'IA a également un impact important dans le contexte des conflits armés et des crises humanitaires. Avec deux expositions montées en coopération avec le CICR - Digital Dilemmas et Deep Fakes - la Suisse a su tirer parti de ses présidences du Conseil afin de sensibiliser à cette question et aux défis y relatif.  En partenariat avec le HCR, la Suisse s’engage à protéger les personnes déplacées de force ainsi que les acteurs humanitaires des risques numériques, tels que la désinformation et les discours de haine en ligne. Ainsi, elle s’efforce d’explorer comment l’intelligence artificielle peut contribuer à atténuer ces risques, notamment dans les contextes humanitaires.

Monsieur le Président,

L'émergence et diffusion des technologies comme l'intelligence artificielle ont un impact profond sur la paix et sécurité mondiale. La Suisse est convaincue de l'importance pour le Conseil de sécurité de prendre en compte, de manière systématique, ces développements afin d'identifier les réponses politiques et les actions concrètes nécessaires. La Suisse est fière d'avoir contribué à apporter des idées et des impulsions lors de son mandat en tant que membre élu ces deux dernières années.

Je vous remercie.

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