Monsieur le Président,

La Suisse tient à remercier le Kenya pour l’organisation de ce débat et les intervenantes et intervenants pour leurs contributions.

Comme plusieurs d’entre eux l’ont déjà évoqué, les questions de consolidation et de pérennisation de la paix ne sont pas seulement liées aux situations des pays en conflit, dont le Conseil de sécurité traite, mais sont une tâche permanente pour tous les états.

Comme la philosophe genevoise Jeanne Hersch l’a décrit, une paix au service des humains ne peut pas être définie purement par l’absence de conflit armé. Les droits de l’homme doivent être respectés. Car une paix durable doit être fondée sur le choix libre et conscient des femmes et des hommes de vivre entre eux en reconnaissant et respectant les droits et libertés de chacun.

C’est ainsi qu’en Suisse, nous avons eu depuis 1848 l’occasion de développer une longue expérience sur les origines de et les conditions propices à la paix. Cette paix fut fondée sur des principes de gouvernement et un système juridique prenant en compte la diversité de ses citoyens sous des aspects culturels, linguistiques, religieux et économiques. Notre système de gouvernement offre ainsi une grande liberté, mais celle-ci est toujours empreinte du devoir de respect des droits d’autrui.

Monsieur le Président, le sujet du débat ouvert nous amène à trois constats centraux :

Premièrement, la paix doit être inclusive pour être pérenne et cette pérennité exige un examen constant.

Le respect de chacun par chacun ne peut jamais être pris pour acquis – et le degré d’inclusion de systèmes de sociétés même réputés stables doit être remis en question de manière régulière. C’est ainsi que notre gouvernement a approuvé le 1er octobre 2021 la mise en œuvre de deux conventions sœurs du Conseil de l’Europe : la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales et la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires. Et le 26 septembre dernier, le peuple suisse s’est exprimé largement en faveur du mariage pour tous, permettant à un nombre d’hommes et femmes longtemps exclus de jouir pleinement des droits et devoirs liés à l’union maritale.

Deuxièmement, le Conseil de sécurité a un rôle important à jouer dans ce domaine.

Si la garantie de cette inclusion incombe en premier lieu aux états, le Conseil de sécurité a depuis plusieurs années reconnu l’importance d’une pérennisation de la paix, le plus récemment par le biais de la résolution 2558 examinant l’ensemble des activités de consolidation de la paix et la résolution 2594 traitant des transitions des missions de maintien de la paix. Le Conseil de sécurité a donc la légitimité, les moyens et le mandat pour faire avancer l’objectif de la consolidation et de la pérennisation de la paix.

Nous saluons vos efforts et ceux de vos prédécesseurs à la tête du Conseil de sécurité qui ont su augmenter non seulement le nombre mais également la diversité des intervenantes et intervenants.

Nous appelons également le Conseil à continuer de façonner les mandats de ses missions de paix afin de garantir une concertation large, incluant tous les acteurs contribuant à la consolidation de la paix, des autorités nationales aux acteurs de la société civile, en particulier les femmes et les jeunes. Nous en appelons d’ailleurs à une coordination, cohérence et coopération forte avec la Commission de consolidation de la paix.

Troisièmement, si une responsabilité particulière incombe au Conseil de sécurité, tous les Etats membres peuvent contribuer.

C’est ainsi que la Suisse s’engage, au travers de l’architecture de consolidation de la paix, mais également par les moyens de la coopération bilatérale dans le soutien des processus de consolidation de la paix, par exemple en Haïti, où nous allons approfondir notre soutien pour la réduction de la violence communautaire. La Suisse, en tant que membre de la Freedom Online Coalition, s’engage également pour la liberté d’internet et contre la propagation de la désinformation et des discours de haine en ligne. Ces investissements visant à prévenir plutôt qu’à surmonter les conflits, méritent d’être décuplés et nous appelons tous les états à suivre l’appel du Secrétaire Général émis dans « Notre Programme Commun » afin assurer le financement durable de la consolidation de la paix.

Monsieur le Président

Si nous avons souligné les responsabilités de notre organisation, du Conseil de sécurité et des Etats membres, nous devons également nous rappeler le devoir individuel qui nous incombe à tous personnellement. Car les humains sont les bâtisseurs de paix au travers de la tolérance d’autrui. Et comme Jeanne Hersch le disait, « la tolérance véritable a la même racine que les Droits de l'homme. Or cette racine est en même temps celIe de la liberté et de la vérité ».

Je vous remercie.