Monsieur le Président,
Je remercie la République de Corée d'avoir organisé ce débat important sur les défis de la cybersecurité. Je remercie également le Secrétaire général, la professeure Nnenna Ifeanyi-Ajufo, et M. Stéphane Duguin, Directeur du CyberPeace Institute à Genève, pour leurs contributions.
La Suisse observe deux évolutions déterminantes dans le cyberespace qui nous préoccupent. D'une part, la numérisation accrue des conflits et le recours à des opérations cyber pendant les conflits armés sont en train de transformer la nature de ceux-ci. D’autre part, l'intensité croissante des attaques par des logiciels de rançon et des cyberattaques parrainées par des États contre des infrastructures critiques est une préoccupation majeure pour la Suisse. L’utilisation de rançongiciels pour extorquer de devises et cryptomonnaies ou encore le ciblage d’infrastructures critiques menacent de paralyser des structures clés de nos sociétés. Ces activités affectent également la capacité de la communauté internationale à atteindre les objectifs du développement durable à cause de la vulnérabilité accrue des Etats en voie de développement. Elles peuvent poser une menace pour la paix et la sécurité internationales et relèvent donc de la compétence de ce Conseil.
La note conceptuelle proposée par la République de Corée s’interroge sur le rôle que peut avoir le Conseil par rapport aux menaces qui découlent des activités malveillantes dans le cyberespace. Permettez-moi d’esquisser quelques options à cet égard.
Premièrement, le Conseil devrait régulièrement prendre note des évolutions et des menaces actuelles en termes de cybersécurité. Étant donné les implications multidimensionnelles et la portée géographique de la question, il serait opportun pour le Conseil de tenir une séance d'information régulière. Lors de cette session, des présentations pourraient être faites par des représentantes et représentants des entités onusiennes, du secteur privé, de la société civile et du monde académique, ainsi que d’autres entités concernées. Cette sensibilisation lui permettrait de prendre des décisions en toute connaissance de cause, notamment sur des dossiers géographiques spécifiques et dans le cadre des opérations de maintien de la paix.
Deuxièmement, le Conseil devrait réaffirmer certains principes reconnus. Nous attachons une importance toute particulière à l’applicabilité du droit international dans le cyberespace, et notamment du droit international humanitaire aux activités dans l’espace cybernétique dans le cadre de conflits armés. Le Conseil devrait également souligner l’importance de la responsabilité des États et de leur devoir de précaution ainsi que reconnaitre les onze normes de comportement responsable des États dans le cyberespace. Ces éléments, complétés par des mesures de confiance et de renforcement des capacités, constituent le cadre pour un comportement responsable des États dans l'utilisation des Technologies de l'information et de la communication (TIC), qui a été adopté par consensus par l'ensemble des États membres des Nations unies. Nous soutiendrions un produit du Conseil qui affirmerait ce cadre et contribueraient ainsi au rétablissement de la confiance.
Finalement, l’activité du Conseil doit être complémentaire aux activités d’autres organes. Il ne s’agit pas pour le Conseil de développer de règles de comportement ou accords. Ceci est l’apanage de l’Assemblée générale et des processus d'experts qu'elle a mandatés. Le Conseil devrait focaliser son attention à développer sa compréhension des risques et à les atténuer, y compris dans des cas de figure concrets.
Monsieur le Président,
L’utilisation responsable du cyberespace présente de vastes opportunités pour relever les défis de demain, malgré les risques reconnus. Dans son Nouvel agenda pour la paix, le Secrétaire général nous encourage à trouver de nouveaux moyens de nous prémunir contre ces nouvelles menaces. Si les négociations du Pacte pour l'avenir nous offrent la possibilité de développer une compréhension commune à cet égard, le Conseil a également un rôle clé à jouer. Le débat de ce jour le confirme.
Je vous remercie.