Monsieur le Président,
Il y a 75 ans, suite aux horreurs de la Deuxième guerre mondiale, les Conventions de Genève étaient adoptées. « Notre vœu le plus ardent serait qu’elles n’eussent jamais l’occasion d’être appliquées », déclarait Max Petitpierre, ancien Président de la Confédération suisse et Président de la Conférence diplomatique, lors de l’adoption de ces textes. Aujourd’hui, 75 ans plus tard, nous devons constater que ce vœu ne s’est pas réalisé. Les Conventions de Genève et leurs Protocoles additionnels sont par conséquent plus pertinents que jamais.
La Suisse salue la tenue de ce débat ouvert d’aujourd’hui. Il représente l’occasion de réaffirmer notre engagement commun pour plus d’humanité et de rappeler l’obligation qui nous revient, à nous tous, de mettre en œuvre le droit international humanitaire. Nous remercions la Conseillère spéciale du Secrétaire général pour la prévention du génocide, la Sous-Secrétaire générale aux affaires humanitaires, la Présidente du CICR ainsi que le Directeur du Center for Civilians in Conflict (CIVIC) pour leurs exposés qui illustrent l’urgence et la pertinence de nos délibérations de ce jour.
Monsieur le Président,
Dans son dernier rapport annuel sur la protection des civils dans les conflits armés le Secrétaire général attire notre attention sur un fait profondément troublant : tandis que les conflits armés dans le monde se multiplient, le droit international humanitaire est trop souvent bafoué. En voici quelques exemples :
- L’accès humanitaire à Gaza est gravement entravé, alors que la moitié de la population souffre de faim catastrophique et que la famine est imminente.
- Au Soudan, nous observons que la population civile est prise pour cible et que des violences sexuelles sont commises systématiquement dans le cadre du conflit.
- En Ukraine, les mines et les restes explosifs de guerre ont tué et mutilé des centaines de civils, y compris des enfants.
- Au Myanmar, plus de 3 millions de personnes ont été obligées de quitter leurs foyers depuis le début du conflit.
Monsieur le Président,
Ces exemples n’illustrent pas les corollaires inévitables des conflits armés. Ce sont, au contraire, des conséquences évitables dues à un manque de volonté politique de respecter le droit international humanitaire.
Protégeons les civils !
- En appelant sans équivoque toutes les parties aux conflits à respecter strictement le droit international humanitaire, partout et en toutes circonstances, et ceci même en l’absence de réciprocité ;
- Protégeons les civils, en exigeant un accès rapide, sûr et sans entrave à l’assistance humanitaire, et en protégeant ceux qui s’engagent en faveur de la protection des civils, comme l’exige le projet de résolution proposé par la Suisse qui est en train d’être négocié et qui sera prochainement ouvert au co-parrainage ;
- Protégeons les civils, en renforçant le droit international humanitaire par la ratification et la mise en œuvre de toutes les conventions pertinentes, notamment les Protocoles additionnels aux Conventions de Genève ;
- Protégeons les civils, en assurant que justice soit rendue aux victimes des violations du droit international humanitaire. La Suisse appelle tous les Etats à reconnaître et soutenir la Cour Pénale Internationale ;
- Protégeons les civils, en améliorant la prévention des violations du droit international et utilisant systématiquement les instruments d’alerte précoce à notre disposition, par exemple en lien avec la famine.
Monsieur le Président,
Les Conventions de Genève représentent la pierre angulaire de l’édifice normatif que nous avons construit, pierre par pierre, sur les décombres des guerres, pour protéger les populations civiles et les personnes hors de combat. Chacun de nous, chaque Etat, a non seulement l’obligation de respecter le droit international humanitaire, mais également de le faire respecter, que ce soit au sein de son territoire ou par les parties au conflit.
Assumons nos responsabilités ! Saisissons l’opportunité que nous offrent les différents anniversaires en lien avec la protection des civils qui jalonnent cette année pour réclamer d’une voix forte et unie le plein respect, sans nuances ni exceptions, du droit international humanitaire. Car ce monde a ardemment besoin de plus d’humanité.
Je vous remercie.