Merci, Monsieur le Président,

Et comme mes collègues je voudrais remercier le Mozambique de nous avoir convoqués aujourd’hui, et remercier le Secrétaire général et le Commissaire Bankole de leurs exposés avisés. Je tiens également à remercier la Commission de consolidation de la paix pour le soutien qu’elle apporte aux efforts de consolidation de la paix. Je remercie en particulier l’Ambassadeur Danese de son briefing.

Et je ne voudrais pas manquer non plus l’occasion de vous féliciter de l’adoption de la déclaration présidentielle et de remercier tous les membres du conseil, avec notre co-porte-plume de la Sierra Leone, pour avoir trouvé un consensus aussi sur la déclaration UNOWAS Sahel.

« L'Afrique est un continent en plein essor, une terre au potentiel incroyable et un marché débordant d'opportunités. Il est temps de commencer à penser à l'Afrique en termes d'avenir et non de passé. » Ce sont les mots prononcés en 2021 par la Directrice générale de l'Organisation mondiale du commerce, Ngozi Okonjo-Iweala.

L'Afrique peut en effet être synonyme d’avenir, d’un avenir puissant. Nous pouvons mobiliser davantage le potentiel des États africains à partir de leurs expériences en matière de prévention pour mieux adresser les immenses défis globaux en termes de sécurité et développement. La prévention fait partie du mandat de ce Conseil, elle a une place importante dans le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général, et aussi dans l’Agenda 2063 de l’Union africaine. J’y vois trois enseignements clés :

Le premier, c’est que nous devons concevoir ensemble la paix, le développement durable et les droits humains. L'instabilité et les conflits sur le continent africain se nourrissent d'un mélange de différentes causes profondes : manque de perspectives économiques, marginalisation, faible présence étatique dans certaines régions et compétition pour les ressources, mais aussi, avec un impact plus indirect, le changement climatique. Une prévention efficace s'intéresse à tous ces facteurs d’instabilité, et en particulier, à leur interaction. Avec des stratégies nationales de prévention, les pays peuvent puiser dans la riche tradition de résolution des conflits et de médiation en Afrique, souvent ancrés au niveau local. Un bon exemple est une initiative lancée au Nord du Bénin avec soutien suisse, qui vise à prévenir la propagation des groupes extrémistes armés. En mettant en œuvre une approche holistique qui investit dans l'aménagement du territoire et crée des incitations économiques, cette initiative empêche, de manière efficace, le recrutement de populations ciblées par les groupes armés.

Un deuxième enseignement est l’importance du traitement du passé. Au niveau national, on trouve de nombreux exemples réussis de formats innovants pour rendre la justice, tels que le Tribunal spécial de nos collègues de Sierra Leone ou des moyens non-judiciaires comme la commission de la vérité en Afrique du Sud. Ces mécanismes peuvent en même temps servir à assurer la non-répétition des atrocités, à rendre justice aux victimes et à favoriser la réconciliation des communautés.

Le troisième enseignement est le pouvoir d’une étroite coordination régionale. Nous voyons l’importance des instruments tels que l’Agenda 2063, l’Architecture de la gouvernance africaine, ou l’Initiative pour faire taire les armes afin d’unir les forces sur le continent, et au-delà. En effet, même si nous soutenons entièrement le principe des "solutions africaines aux problèmes africains", cela ne dédouane pas la communauté internationale d’assumer ses responsabilités. Ceci, car les solutions contribuent souvent à un bien commun mondial tel que lutter contre les facteurs transfrontaliers d'instabilité et à créer des conditions favorables à la croissance, au développement durable et à l'intégration. Toutefois, avec une mise en œuvre accrue du cadre normatif commun, ces dividendes en termes de paix et de prospérité pourraient encore se multiplier.

Monsieur le Président,

Les Etats africains et leurs institutions régionales assument un rôle important en matière de prévention. Nous reconnaissons leur voix forte et leur rôle de bâtisseurs de ponts. L’Union africaine a toujours été une force motrice dans les Agendas femmes, paix et sécurité et jeunesse, paix et sécurité. Dans ce sens, les initiatives comme FemWise et le Panel des sages sont des modèles phares de l'Union africaine. De plus, nous saluons l’élaboration d’une position africaine commune sur les liens entre climat, paix et sécurité – un signal important qui pourra inspirer ce Conseil également.

Une coopération plus étroite entre l'Union africaine et les Nations unies, y compris ce Conseil, promet un grand potentiel. La résolution 2719 du Conseil sur le financement des opérations de soutien à la paix de l’UA adoptée en décembre constitue une base prometteuse.  Elle a, entre autres, permis un premier échange substantiel entre les comités d’états-majors du Conseil de paix et de sécurité de l’UA et le Conseil de sécurité. Je suis confiante que les premiers cas d’application de la résolution seront bientôt identifiés.

Le Conseil de sécurité a donc tout intérêt à tirer les enseignements de l’expérience des pays africains en matière de prévention des conflits. Les échanges annuels entre le Conseil de sécurité et le Conseil de paix et de sécurité sont un instrument crucial à cet égard. La Suisse se réjouit du prochain échange entre les deux Conseils qui aura lieu pendant notre présidence en octobre. Nous ferons tout pour le rendre le plus visionnaire, efficace et constructif possible.

Je vous remercie.