Monsieur le Président, Monsieur le secrétaire d'Etat,

Permettez-moi d’abord de féliciter le Royaume-Uni pour sa présidence du Conseil en juillet et je vous souhaite à vous, Monsieur le Président, ainsi qu’à votre équipe, plein succès pour la tenue des travaux de ce mois. Vous pouvez compter sur le soutien de la Suisse. Je vous remercie aussi pour l’organisation de ce débat, qui tombe à point nommé, ainsi que les intervenantes et l’intervenant pour leurs contributions. Nous saluons également la présence des représentants de haut niveau.

La guerre engendre la faim et la faim engendre la guerre. La crise alimentaire mondiale est sans précédent et déstabilise des pays et des régions, comme l’a démontré aussi le débat ouvert sur la protection des civils en mai dernier sous présidence Suisse. Le phénomène continue de s’aggraver en Somalie, au Soudan, notamment au Darfour, au Soudan du Sud, au Sahel, en Afghanistan, au Yémen, en Syrie et ailleurs dans le monde. Ainsi nous regrettons la décision de la Russie de cesser la mise en œuvre de l’Initiative de la mer Noire et condamnons les récentes attaques visant les ports ukrainiens qui risquent de détériorer la situation mondiale d’avantage.

En adoptant la résolution 2417, ce Conseil s’est dit conscient de la nécessité de mettre fin au cercle vicieux du conflit armé et de l’insécurité alimentaire. Il s’est engagé à y prêter toute l’attention voulue afin de mieux prévenir la famine. Le rôle du Conseil dans la prévention des crises est également au cœur du Nouvel Agenda pour la Paix. La Suisse appelle à la pleine mise-en-œuvre des mécanismes de prévention prévus dans la résolution 2417, et se félicite de la récente réunion sur la sécurité alimentaire en République démocratique du Congo, au Burkina Faso et en Haïti.

Afin de mieux prévenir les crises alimentaires, y compris la famine, mon pays appelle à renforcer les trois domaines suivants :

Premièrement, le respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme par toutes les parties est impératif afin de minimiser l’impact des conflits armés sur la situation alimentaire. L’accès des civils aux biens et services essentiels doit être préservé. Les objets indispensables à la survie de civils, à l’instar des denrées alimentaires, des installations d’eau et autres infrastructures nécessaires à la production et à l’approvisionnement alimentaires, ne peuvent faire l’objet d’attaques et doivent être protégés, comme l’exige le droit international humanitaire. Nous appelons les parties concernées à garantir l’acheminement rapide, sûr et sans entrave de l’aide humanitaire aux personnes dans le besoin. Nous déplorons que des acteurs humanitaires, tels que le CICR, ne soient pas toujours en mesure de mener à bien leurs opérations, comme en ce moment à travers le Corridor de Latchine dans le Caucase du sud. Nous rappelons également l’importance de la mise en œuvre de la résolution 2664 de ce Conseil, qui facilite les opérations humanitaires dans certains contextes les plus difficiles.

Deuxièmement, dans de nombreux contextes fragiles, ce sont souvent les femmes et les filles qui mangent en dernier et celles qui mangent le moins. C'est encore plus vrai dans les situations de conflit où ces dernières cherchent des solutions. Comme l’a souligné la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit, nous ne devons pas sous-estimer le fait que l'insécurité alimentaire augmente le risque d'exposition à la violence sexuelle. C’est pourquoi nous devons veiller à intégrer une perspective de genre dans les mesures visant à améliorer la sécurité alimentaire.

Troisièmement, l’impunité, notamment pour ceux qui affament délibérément des civils comme méthode de guerre, doit être résolument combattue. Trop souvent, les populations civiles sont délibérément privées de leurs moyens de subsistance, ce qui provoque d’immenses souffrances et déstabilise encore davantage les zones de conflit. En 2019, le Statut de la Cour Pénale Internationale a été modifié à l’initiative de la Suisse afin que ce crime puisse également être poursuivi dans les situations de conflits internes. Nous appelons tous les États parties à ratifier cet amendement.  

Monsieur le Président,

« La paix se bâtit mal l’estomac vide », l’agronome américain et lauréat du prix Nobel Norman Borlaug nous le rappelle. Il est d’autant plus important de s'attaquer aux causes profondes de l’insécurité alimentaire. Les conflits armés et la violence en sont le moteur principal, et la pression croissante exercée par les crises économiques et le changement climatique ajoutent aux difficultés. Les solutions politiques aux conflits doivent faire partie de notre approche globale visant à éliminer la faim, à garantir à tous l’accès à une nourriture suffisante et adéquate et à promouvoir des systèmes alimentaires résilients, inclusifs et durables.

Je vous remercie.